ACTUALITÉS

Mis à jour le 22/04/2020

LOI URGENCE COVID-19 : Que contiennent les 5 nouvelles ordonnances sur le travail publiées le 2 avril 2020 ?

Doublement du plafond de la prime Macron, élargissement des missions de la médecine du travail, report de Qualiopi, la Ministre du travail a présenté ce mercredi 1er avril 2020 en Conseil des ministres 5 nouvelles ordonnances qui viennent modifier provisoirement le droit du travail. Regardons plus en détail ce que contiennent ces 5 ordonnances :
 

Ordonnance n°2020-385 : Prime PEPA dite Prime Macron

L’Ordonnance n° 2020-385 vient modifier la loi n° 2019-1446 d’urgence Covid-19 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, notamment son article 7 en doublant le plafond et en élargissant les conditions de modulation du versement de la prime.

La « prime de pouvoir d’achat » également appelée « prime Macron », ou « prime Gilet Jaunes », est un dispositif sans charge et net d’impôt qui s’applique aux primes versées par les entreprises à leurs salariés. Il a pour objectif d’accroitre le pouvoir d’achat des salariés sans pour autant alourdir les charges de l’entreprise. Dans les circonstances actuelles, il va permettre de saluer le travail des personnes qui se trouvent en 1ère ligne face au virus.

Pour être claire, la loi ne prévoit aucun montant minimum ou d’obligation de versement. Cela veut dire que l’entreprise est libre de fixer le montant qu’elle souhaite. Sous condition d’avoir mis en place un accord d’intéressement avant le 31/08/2020, Elle est exonérée de charges et défiscalisée jusqu’à 2000€. S’il n’y a pas eu d’accord d’intéressement mis en place, le plafond est abaissé à 1000€ pour que la prime soit exonérée et défiscalisée.
Attention
: Au-delà de cette fraction, la prime sera soumise à des cotisations sociales et à un impôt sur le revenu au même titre que n’importe quelle prime !

Comme l’année dernière, elle est réservée aux salariés dont la rémunération mensuelle brute se situe sous un plafond équivalent à 3 SMIC : soit 54763,92€ bruts. Elle est destinée aux salariés liés à l’entreprise par un contrat de travail (CDD, CDI, contrat d’alternance…) mais également aux intérimaires mis à disposition de l’entreprise.

Son montant peut être modulé en fonction de la rémunération, mais également du statut, du temps de présence, du temps de travail des salariés et/ou des conditions de travail liées à l’épidémie. Les modalités doivent être prévues par un accord d’entreprise ou une décision unilatérale de l’employeur. Désormais, elle doit être versée au plus tard le 31 décembre 2020!

Concernant la question de la modulation du montant de la prime, dans ses questions/réponses le ministère du Travail apporte les précisions suivantes :

                ⇒  La prime peut être  majorée pour l’ensemble des salariés ayant continué leur activité pendant la période d’urgence                   sanitaire;

                ⇒  Elle peut également être majorée pour les personnes ayant été au contact du public (On comprend dans ce cas                           qu’un salarié qui n’a pas été effectivement présent dans l’entreprise au cours des 12 mois précédant le versement de                     la prime peut prétendre au versement de la prime.) ;

               ⇒  Il est possible également de tenir compte des différences dans les conditions de travail des salariés ayant continué                  leur activité (ceux qui télétravaillent et ceux qui ont dû se rendre sur leur lieu de travail) ;

               ⇒  La différence peut se faire sur la durée de la continuité sur le lieu de travail . 

Dans ces questions, il est également précisé que la modulation peut exclure complètement les salariés en télétravail et ainsi « permettre de récompenser la possibilité de prendre en compte la présence effective du salarié, en excluant, par exemple, les salariés en télétravail ». On peut s’interroger sur cet éclaircissement car modulation ne veut pas dire suppression.

 

 

Ordonnance n° 2020-386 : Adaptation des conditions d'exercice des missions des services de santé au travail

L’ordonnance 2020-386 vient aménager les modalités d’exercice des services de santé au travail (Médecine du travail), leurs missions et notamment le suivi de l’état de santé des salariés.

Un rôle de prévention et d’appui :
Les services de santé au travail doivent participer à la lutte contre la propagation du virus notamment en exerçant un rôle de prévention. Ils exercent ce rôle en diffusant des messages de prévention et en venant en appui dans la mise œuvre des mesures de prévention pour les entreprises qui doivent accroitre ou adapter leur activité.

Prescription d’arrêt de travail et dépistage :
Dès à présent et en dérogation avec le code de la sécurité sociale, le médecin du travail peut prescrire et/ou renouveler un arrêt de travail en cas d’infection ou de suspicion d’infection au Covid-19. Ils pourront également procéder à des tests de dépistage du Covid-19. Le protocole est défini par arrêté des ministres chargés de la santé et du travail et dans des conditions définies par décret.

Visites médicales :
Les visites prévues dans le cadre du suivi de l’état de santé des travailleurs peuvent être reportées, sauf si le médecin du travail les estime indispensables.
Un décret en Conseil d’État doit préciser les modalités d’application de cet article, notamment pour les travailleurs de nuit, personnes en situation de handicap ou titulaires d’une pension d’invalidité, mineurs, femmes enceintes, venant d’accoucher ou allaitantes…

Autres interventions du médecin du travail :
Sauf si le médecin du travail estime qu’il y a urgence pour la santé des travailleurs, les autres interventions (visites d’entreprises, études de poste, réalisations de mesures et conseils sur l’environnement de travail, études ergonomique…) sont reportés ou annulées.
Ces mesures sont applicables jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 31 août 2020. Les visites prévues dans le cadre du suivi de l’état de santé qui se seraient vues reportées après cette date devront être organisées avant une date fixée par décret, au plus tard le 31 décembre 2020.

Ordonnance n°2020-387 : Mesures d'urgence en matière de formation professionnelle

1. Prolongation des contrats d’apprentissage

Depuis le 15 mars 2020, tous les CFA et organismes de formation ont suspendu l’accueil en formation, et ce jusqu’à nouvel ordre. Ce principe s’applique à l’ensemble des personnes en formation, quel que soit leur statut.
L’ Ordonnance n° 2020-387 permet la prolongation des contrats d’apprentissage et de professionnalisation pour tenir compte de la suspension de l’accueil des apprentis et des stagiaires par les centres de formation d’apprentis (CFA) et les organismes de formation depuis le 12 mars 2020.

Le code du travail prévoit que le début de l’apprentissage au sein d’une entreprise doit avoir lieu au plus tôt 3 mois avant et au plus tard 3 mois après le début du cycle de l’organisme de formation auquel l’apprenti est inscrit, sauf dérogation.
L’ Ordonnance n° 2020-387 porte de trois à six mois la durée pendant laquelle un jeune peut rester en formation dans un CFA ,dans l’attente de la conclusion d’un contrat d’apprentissage.

2. Entretiens d’état des lieux du parcours professionnel

Depuis le 7 mars 2014, les entreprises doivent organiser tous les deux ans un entretien professionnel pour tous les salariés. À partir de 2020, cet entretien inclut (pour les salariés ayant au moins 6 ans d’ancienneté) un état des lieux récapitulatif de leur parcours professionnel tous les 6 ans, afin :
– D’identifier les compétences des salariés; 
– De repérer leurs potentiels
– De déterminer leurs besoins de formation
– d’Échanger sur les perspectives d’évolution professionnelle.

La réalisation de ces entretiens d’état des lieux du parcours professionnel peut être reportée, à l’initiative de l’employeur, jusqu’au 31 décembre 2020 lorsque ces entretiens interviennent au cours de l’année 2020.
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, si au cours des 6 dernières années, le salarié n’a pas bénéficié des entretiens professionnels et d’au moins une formation (autre que les formations « obligatoires »), un abondement de 3000 euros est inscrit à son Compte Personnel de Formation (CPF). Cette somme est versée par l’entreprise à la caisse des dépôts et consignations.
L’application de ces sanctions est suspendue jusqu’au 31 décembre 2020 lorsque ces entretiens sont reportés car ils n’ont pas pu être réalisés dans les délais, compte tenu des circonstances exceptionnelles liées à la crise sanitaire actuelle.

3. La validation des acquis professionnels (VAE)

La période de confinement peut être propice à la poursuite ou la réalisation d’une validation des acquis professionnels (VAE). Cette ordonnance autorise les OPCO et Transitions Pro à financer de manière forfaitaire la VAE. Le montant de cette prise en charge sera déterminé dans la limite de 3000 € par les organismes financeurs.
Il pourront, à titre dérogatoire, mobiliser les fonds dédiés au financement de l’alternance, les contributions complémentaires collectées pour le développement de la formation professionnelle continue ou encore les fonds destinés au financement des transitions professionnelles. Ces dispositions s’appliqueront jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2020.

4. La certification pour les organismes de formation

Cette ordonnance reporte au 1er janvier 2022 les échéances fixées par la loi en matière de certification qualité et d’enregistrement des certifications et des habilitations dans le répertoire spécifique.
La loi “avenir professionnel” a instauré de nouvelles règles applicables au 1er janvier 2021. Un organisme de formation devait avoir obtenu la nouvelle certification qualité pour pour pouvoir mobiliser des fonds publics ou mutualisés :   la fameuse certification « QUALIOPI » délivrée par des organismes certificateurs. Compte tenu du confinement, ces organismes certificateurs ne peuvent plus exercer leur activité conformément au calendrier initial. 

Pour être éligible au CPF, les formations doivent être sanctionnées par une certification enregistrée au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ou au Répertoire spécifique (qui se substitue à l’Inventaire). C’est France compétences qui a la charge d’établir et de tenir à jour ces deux répertoires nationaux.
L’ordonnance n° 2020-387 reporte d’un an, soit le 1er janvier 2022, l’échéance de l’enregistrement, dans le répertoire spécifique tenu par France compétences, des certifications ou habilitations recensées à l’inventaire au 31 décembre 2018.

Ordonnance n° 2020-388 : Report des élections TPE

Contrairement à ce qui est prévu dans les entreprises de plus de 11 salariés, les salariés des TPE ne désignent pas de représentants du personnel. C’est précisément parce que les salariés des entreprises de moins de 11 salariés et les employés à domicile ne peuvent élire de représentants du CSE que l’élection TPE a été mise en place pour eux.

Du 23 novembre au 6 décembre 2020, près de 4,5 millions de salariés des TPE (très petites entreprises de moins de 11 salariés) et des particuliers employeurs, étaient appelés à voter pour l’organisation syndicale qui allait les représenter durant les 4 prochaines années. La 1ère phase a débuté lundi 2 mars avec le dépôt des candidatures des organisations syndicales en ligne. L’ordonnance reporte le prochain scrutin qui pourra ainsi se tenir au cours du premier semestre 2021.

Elle prévoit donc la prorogation des mandats en cours des conseillers prud’homaux jusqu’à cette date. Cette ordonnance décale également le prochain renouvellement des membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles à une date fixée par arrêté du ministre chargé du travail, et au plus tard le 31 décembre 2021. Par conséquent, le mandat en cours des membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles est prorogé jusqu’à cette date.

Ordonnance n° 2020-389 : Mesures d'urgence relatives aux instances représentatives du personnel

1. Les élections du CSE

Toutes les élections du CSE en cours sont suspendues à compter du 12 mars 2020. Toutefois, lorsque le processus électoral a donné lieu à l’accomplissement de certaines formalités après le 12 mars 2020, la suspension prend effet à compter de la date la plus tardive à laquelle l’une de ces formalités a été réalisée.
La suspension prendra fin 3 mois après la cessation de l’état d’urgence sanitaire.  Cette suspension concerne l’ensemble des délais du processus électoral. Cela concerne aussi bien les délais que l’employeur doit respecter que ceux de l’autorité administrative pour prendre une décision.
Quelques précisions :
– Cette suspension entre deux tours des élections ne remet pas à en cause la régularité du premier tour quelle que soit la durée de la suspension;
– Cette suspension n’a pas d’incidence sur la régularité du scrutin;
– Les conditions d’électorat et d’éligibilité s’apprécient à la date de chacun des deux tours du scrutin.

Attention : Les employeurs qui doivent organiser des élections du CSE doivent le faire dans délai de trois mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Le code du travail prévoit que les élections partielles doivent être organisées par l’employeur dès lors qu’un collège électoral du CSE n’est plus représenté ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du CSE est réduit de moitié ou plus et si ces événements interviennent moins de six mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du comité social et économique.
Si la fin de la suspension du processus électoral tombe moins de six mois avant le terme des mandats en cours, l’employeur n’est pas tenu d’organiser les élections partielles, que le processus électoral ait été engagé ou non avant suspension.

2. Protection des représentants du personnel

L’ordonnance prévoit :
– La prorogation des mandats en cours des représentants élus des salariés jusqu’à la proclamation des résultats du premier ou, le cas échéant, du second tour des élections professionnelles;
– La prorogation de la protection des salariés candidats et des membres élus de la délégation du personnel du comité social et économique, titulaires ou suppléants ou représentants syndicaux au CSE jusqu’à la proclamation des résultats du premier ou, le cas échéant, du second tour des élections professionnelles.

3. Nouveaux moyens de communication

Aujourd’hui, sauf si un accord le prévoit, les textes limitent le recours à la visioconférence à trois réunions par année civile.
L’ordonnance vient non seulement déroger à cette règle mais également à titre dérogatoire et temporaire, permettre l’organisation de réunions de ces comités par conférence téléphonique. Si toutefois la visioconférence ou l’audioconférence ne sont pas possibles, elle autorise l’usage de la messagerie instantanée de type WhatsApp .
Ces dispositions dérogatoires et temporaires sont applicables aux réunions convoquées jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire. Elles sont également applicables à toutes les autres instances représentatives du personnel régies par les dispositions du code du travail.

4. Ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 portant sur les mesures d'urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos

Le code du travail prévoit que le CSE doit être préalablement informé et consulté pour toutes les questions concernant l’organisation du travail. Il dispose alors d’un délai d’un mois à compter de sa saisine pour rendre son avis.
Compte tenu de l’urgence de la situation, le CSE sera informé concomitamment à la mise en œuvre par l’employeur.

Avatar Myriam
Écrit par Myriam Nectoux - BPHR Conseil

Vous avez besoin de structurer votre organisation, recruter les bons talents et développer les compétences présentes, sécuriser vos procédures et répondre aux obligations légales ? Nous pouvons vous accompagner ! Créatives, adaptables, responsables, et en recherche permanente de l’excellence, nous saurons vous proposer des solutions différenciantes et adaptées à vos besoins. 

[contact-form-7 id="7090" title="Contact BPHR fin d'article"]